Droits d'auteur·e & réemploi

Comment le respect des droits de l'artiste-auteur·e peut-il s'articuler à la favorisation du réemploi de scénographie ? Comment le réemploi de scénographie peut-il être un outil de reconnaissance du statut et des droits du·de la scénographe ? Le déploiement des pratiques de réemploi et le respect des droits de l'artiste-auteur·e sur son œuvre peuvent paraître difficilement conciliables : manque de connaissance des droits et responsabilités respectives, manque de reconnaissance, absence de cadres fixés par les parties, absence de chaînes de communication... À quelles conditions le fait d'œuvrer au réemploi d'une scénographie répond-il à ces manques ? Et quelles modalités de travail les parties prenantes d'un projet peuvent-elles mettre en place ? Après trois mois d'observation des pratiques, le groupe de recherche-action « Droits d'auteur·e & réemploi » du Lab a présenté lundi 17 juin 2024, en collaboration avec la vie brève - Théâtre de l'Aquarium, un état des lieux du sujet dans les secteurs public et privé du spectacle vivant et de l'exposition, à retrouver ci-dessous.

Personnes impliquées

  • Laure Abramowitch, avocate, LégiPlanet Avocats
  • Sandrine Andreini, consultante indépendante
  • Solweig Barbier, déléguée générale, Arviva
  • Olivia Berthon, scénographie, studio Vaste
  • Eva Cecotti, cheffe du service juridique, Paris Musées
  • Constant Chiassai-Polin, scénographe
  • Mélinée Faubert, scénographe
  • Mathilde Hervé, chargée de production, Fondation Cartier
  • Gaëlle Kikteff, AMO, formatrice et consultante, Scala circulaire
  • Clémence Letellier, directrice de la création, Athem
  • Amélie Mathieu, conseillère transition écologique, Syndicat National des Scènes Publiques (SNSP)
  • Quentin Rioual, metteur en scène, dramaturge, codirecteur du Lab
  • Clémentine Roche, chargée de production, Fondation Kanal
  • Guy Tellez, chef de projet, Ressourcerie Encore!
  • Hervé Vincent, directeur technique, retraité

  • Valérie-Laure Benabou, professeure de droit privé à l'Université Paris-Saclay / USQV et coprésidente de la commission du Conseil supérieur pour la propriété littéraire et artistique (CSPLA) sur le droit d'auteur et la transition écologique
  • Camille Dugas, scénographe, vice-présidente de l'Union des Scénographes (UDS)
  • Damien Forget, directeur-fondateur de la ressourcerie culturelle de Montaigu (44) et coprésident du RESSAC
  • Élaine Méric, codirectrice de la vie brève - Théâtre de l'Aquarium (75)

Cadre de recherche-action

Constat

  • Manque de reconnaissance du statut d'artiste-auteur·e
  • Méconnaissance des droits spécifiques à chaque catégorie d'acteur·e impliquée
  • Méconnaissance du cadre métier (fiche-métier URSSAF)
  • Absence de documents adaptés pour permettre le travail des ressourceries et de cadre de responsabilité des intermédiaires

Freins

  • Manque de formation
  • Manque de communication
  • Absence de suivi
  • Manque de clarté sur la marche à suivre
  • Cadre juridique des marchés publics inadapté
  • Diversité de la contractualisation

Leviers

  • Causes contractuelles pour contrat de droit privé et pour marchés publics
  • Formation et auto-formation spécifiques
  • Esprit de transparence et d'équité

Cibles

  • Scénographes
  • Ressourceries
  • Producteur·rices et commanditaires

Enjeux

  • Faire un état des lieux des discussions et réflexions
  • S'auto-former aux enjeux relatifs aux droits d'auteur·e dans le cade du réemploi
  • Préciser le rôle des ressourceries sur ce sujet

Objectifs

  • Sensibiliser aux principes fondamentaux du droit d'auteur·e
  • Diffuser l'état des discussions
  • Suggérer des comportements professionnels à mettre en place
  • Proposer des outils

Termes clés du droit d'auteur·e

Le droit d'auteur·e couvre une œuvre dès lors qu'elle présente un caractère original. Le Code de la propriété intellectuelle (CPI) définit en l'occurrence l'œuvre comme une création intellectuelle originale (articles L.121-1 à L.121-9 du CPI).

En droit, deux conditions président donc à la qualification d'une création comme œuvre de l'esprit :

  • originalité de l'œuvre : l'œuvre est marquée par l'empreinte de la personnalité de l'auteur ;
  • formalisation de l'œuvre : l'œuvre est perceptible par les sens.

Le droit d'auteur·e confère deux types de droit :

  • le droit patrimonial, qui permet au titulaire des droits (auteur·e, ayant-droit) de percevoir une rémunération pour l'exploitation de l'œuvre par des tiers ;
  • le droit moral, qui protège les intérêts non économiques de l'auteur·e.

Le droit patrimonial est constitué par deux formes de droits :

  • le droit de représentation, qui encadre la communication de l'œuvre au public, peu importe le procédé utilisé ;
  • le droit de reproduction, fixation matérielle de l'œuvre par tous les procédés qui permettent de la communiquer au public d'une manière indirecte.

Le droit moral est constitué par quatre formes de droits :

  • le droit de divulgation. Seul·e l'auteur·e a le droit de divulguer son œuvre. Il/Elle a le pouvoir de décider de rendre son œuvre publique ou non, ainsi que du moment et des modalités de la première communication de son œuvre.
  • le droit de p·maternité. Il permet à l'auteur·e d'apposer son nom sur son œuvre ou, s'il le souhaite, de rester anonyme ou encore d'utiliser un pseudonyme.
  • le droit au respect de l'intégrité de l'œuvre. L'auteur·e peut s'opposer à toute modification, suppression ou ajout susceptible de modifier son œuvre initiale, tant dans la forme que dans le fond. Seul·e l'auteur·e peut en décider !
  • le droit de retrait et de repentir. En contrepartie de l'indemnisation de celui auquel l'exploitation de l'œuvre a été cédée, l'auteur·e peut décider d'apporter des modifications à l'œuvre (droit de repentir) ou d'en faire cesser la diffusion (droit de retrait), à tout moment et sans avoir à justifier son choix.

Le droit moral se caractérise par trois natures de droits :

  • un droit perpétuel : le droit moral demeure après le décès de l'auteur·e, et même après l'extinction des droits patrimoniaux. Les ayants droit de l'auteur·e peuvent ainsi exercer ce droit, même si l'œuvre est tombée dans le domaine public.
  • un droit inaliénable : aucune clause de renonciation ne peut figurer dans un contrat sous peine de nullité, c'est-à-dire que l'auteur·e ne peut renoncer à son droit moral ni en céder l'exercice à un tiers.
  • un droit imprescriptible : il ne s'éteint pas avec le temps. Tant que l'œuvre existe, et qu'elle soit exploitée ou non, l'auteur·e et ses ayants droit peuvent exercer leur droit moral.

Ceci étant posé, le droit moral doit s'envisager comme un droit défensif plutôt que comme un droit offensif. Aussi ne peut-il justifier une atteinte excessive à la liberté d'expression.

Glossaire

La qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou ceux sous le nom de qui l'œuvre est divulguée.


"Sont considérés notamment comme œuvres de l'esprit :

1° Les livres, brochures et autres écrits littéraires, artistiques et scientifiques ;

2° Les conférences, allocutions, sermons, plaidoiries et autres œuvres de même nature ;

3° Les œuvres dramatiques ou dramatico-musicales ;

4° Les œuvres chorégraphiques, les numéros et tours de cirque, les pantomimes, dont la mise en œuvre est fixée par écrit ou autrement ;

5° Les compositions musicales avec ou sans paroles ;

6° Les œuvres cinématographiques et autres oeuvres consistant dans des séquences animées d'images, sonorisées ou non, dénommées ensemble œuvres audiovisuelles ;

7° Les œuvres de dessin, de peinture, d'architecture, de sculpture, de gravure, de lithographie ;

8° Les œuvres graphiques et typographiques ;

9° Les œuvres photographiques et celles réalisées à l'aide de techniques analogues à la photographie ;

10° Les œuvres des arts appliqués ;

11° Les illustrations, les cartes géographiques ;

12° Les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l'architecture et aux sciences ;

13° Les logiciels, y compris le matériel de conception préparatoire ;

14° Les créations des industries saisonnières de l'habillement et de la parure. Sont réputées industries saisonnières de l'habillement et de la parure les industries qui, en raison des exigences de la mode, renouvellent fréquemment la forme de leurs produits, et notamment la couture, la fourrure, la lingerie, la broderie, la mode, la chaussure, la ganterie, la maroquinerie, la fabrique de tissus de haute nouveauté ou spéciaux à la haute couture, les productions des paruriers et des bottiers et les fabriques de tissus d'ameublement."

(article L. 112-2 du CPI)


Toutes les œuvres de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination, pourvu qu'elles soient des créations originales.

L'idée qui est de libre parcours n'est pas protégeable au titre du droit d'auteur.

La protection vise la mise en forme de l'idée en une création perceptible, dotée d'une physionomie propre portant l'empreinte de la personnalité de son auteur.

Il appartient à celui invoquant la protection au titre du droit d'auteur, ce dernier étant le mieux à même d'en présenter les éléments traduisant sa personnalité, d'identifier les caractéristiques de son œuvre et d'en expliciter l'originalité, ce qui suppose de caractériser qu'elle est issue d'un travail créatif et résulte de choix arbitraires lui conférant une physionomie propre, révélatrice de sa personnalité.


Est dite de collaboration l'œuvre à la création de laquelle ont concouru plusieurs personnes physiques.

L'œuvre de collaboration est la propriété commune des coauteurs.

Les coauteurs doivent exercer leurs droits d'un commun accord.


Est dite composite l'œuvre nouvelle à laquelle est incorporée une œuvre préexistante sans la collaboration de l'auteur de cette dernière.

L'œuvre composite est la propriété de l'auteur qui l'a réalisée, sous réserve des droits de l'auteur de l'œuvre préexistante.


Est dite collective l'œuvre créée sur l'initiative d'une personne physique ou morale qui l'édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l'ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun d'eux un droit distinct sur l'ensemble réalisé.

L'œuvre collective est, sauf preuve contraire, la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée.

Cette personne est investie des droits de l'auteur.


L'œuvre porte l'empreinte de la personnalité de l'auteur et l'expression des choix libres et créatifs de ce dernier


L'auteur a droit au respect de son nom, de sa qualité et de son œuvre. Il est perpétuel, inaliénable et imprescriptible, et transmissible à ses héritiers.

Il est titulaire exclusif du droit de divulgation et du droit de repentir ou de retrait de son œuvre.


L'auteur est titulaire du droit d'exploitation de l'œuvre, qui comprend le droit de représentation et le droit de reproduction.

Le droit de représentation consiste dans la communication de l'œuvre au public par récitation, exécution lyrique, représentation dramatique, présentation publique, projection publique, ou encore par télédiffusion.

La reproduction consiste dans la fixation matérielle de l'œuvre par tous procédés qui permettent de la communiquer au public d'une manière indirecte.

Elle peut s'effectuer notamment par imprimerie, dessin, gravure, photographie, moulage et tout procédé des arts graphiques et plastiques, enregistrement mécanique, cinématographique ou magnétique.

Le droit de représentation et le droit de reproduction sont cessibles à titre gratuit ou à titre onéreux.

La cession du droit de représentation n'emporte pas celle du droit de reproduction.

La cession du droit de reproduction n'emporte pas celle du droit de représentation.

Lorsqu'un contrat comporte une cession totale de l'un des deux droits visés au présent article, la portée en est limitée aux modes d'exploitation prévus au contrat.


Droit inaliénable de l'auteur, de participation au produit de la vente d'une œuvre d'art par un professionnel du marché de l'art. "Les auteurs d'œuvres graphiques et plastiques ont, nonobstant toute cession de l'œuvre originale, un droit inaliénable de participation au produit de toute vente de cette œuvre faite aux enchères publiques ou par l'intermédiaire d'un commerçant. Le tarif du droit perçu est fixé uniformément à 3 p. 100 applicables seulement à partir d'un prix de vente fixé par voie réglementaire."

(Art. L. 122-8 du CPI)


Constitue le délit de contrefaçon, toute reproduction, représentation ou diffusion par quelque moyen que ce soit d'une œuvre de l'esprit en violation des droits de l'auteur tels qu'ils sont définis et réglementés par la loi.

La contrefaçon de droits d'auteur s'apprécie au regard des ressemblances entre les œuvres en présence.


Risque de confusion dans l'esprit du public ou de parasitisme caractérisé par le fait pour une personne physique ou morale de copier une valeur économique d'autrui, à titre lucratif et de manière injustifiée, pour en retirer un avantage concurrentiel, fruit d'un savoir-faire, d'un travail intellectuel et d'investissements.

(Art. 1240 du Code civil)


"Lorsque l'œuvre a été divulguée, l'auteur ne peut interdire : (...) courtes citations 4° La parodie, le pastiche et la caricature, compte tenu des lois du genre (...)" (Article L. 122-5 du CPI)

Sur l'exception de parodie

"la parodie a pour caractéristiques essentielles, d'une part, d'évoquer une œuvre existante, tout en présentant des différences perceptibles par rapport à celle-ci et, d'autre part, de constituer une manifestation d'humour ou une raillerie" (CJUE, C6201/13, Deckmyn)

Trois conditions cumulatives se dégagent donc de cette décision :

  • l'œuvre seconde doit évoquer une œuvre existante ;
  • l'œuvre seconde ne doit pas risquer d'être confondue avec l'œuvre première ;
  • elle doit constituer une manifestation d'humour ou une raillerie.

CJCE, 16 juillet 2009 (Infopaq C-5/08) :

  1. "En ce qui concerne les parties d'une œuvre, il y a lieu de constater que rien dans la directive 2001/29 ou dans une autre directive applicable en la matière n'indique que ces parties sont soumises à un régime différent de celui de l'œuvre entière. Il s'ensuit qu'elles sont protégées par le droit d'auteur dès lors qu'elles participent, comme telles, à l'originalité de l'œuvre entière.
  2. Les différentes parties d'une œuvre bénéficient ainsi d'une protection au titre de l'article 2, sous a), de la directive 2001/29 à condition qu'elles contiennent certains des éléments qui sont l'expression de la création intellectuelle propre à l'auteur de cette œuvre."

Sont titulaires du droit voisin :

  • les artistes interprètes
  • les producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes
  • les entreprises de communication audiovisuelle

La durée de protection des droits voisins est de 50 ans à compter du 1er janvier de l'année civile à partir : de l'interprétation de l'œuvre pour les artistes interprètes, de la première fixation du phonogramme ou du vidéogramme pour les producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes, de la première communication au public des programmes pour les entreprises de communication audiovisuelle. Si la fixation de l'interprétation, du phonogramme ou du vidéogramme font l'objet d'une communication au public ou d'une mise à disposition du public, pendant la période précitée, la durée de 50 ans sera décomptée à partir de la date de cette communication ou de cette mise à disposition.

(Articles L. 212-1 et s. CPI)


Ressources existantes

Fondements juridiques principaux

Documents-ressources

  • Documents des organismes de gestion collective (SACD, ADAGP, SAIF, SCAM...) mais la/le scénographe ne fait pas partie des répertoires de ces OGC
  • Documents d'autres structures professionnelles :
    • Fiche pratique sur le droit d'auteur de la Maison des artistes (aujourd'hui associée à l'Agessa dans la sécurité sociale des artistes-auteurs)
    • Précis juridique sur les œuvres protégées par le droit d'auteur d'Artcena
    • Fiche sur le métier de scénographe d'Artcena

    Documents opérationnels

    Union des Scénographes (UDS)

    Augures Lab Scénogrrrraphie

    Les clauses du manifeste de l'UDS sont structurantes, et les contrats très opérationnels. Des outils complémentaires peuvent être envisagés à l'étape de l'acquisition ou de la cession de biens de scénographie. Or, en phase de conception, les acteur·ice·s futur·e·s (ressourceries, individuel·le·s, ...) sont soit inconnu·e·s, soit pas encore associé·e·s. Ce qui rend impossible tout engagement contractuel mais n'exclut pas la notification d'intentions claires en faveur du réemploi par les parties.

    En contexte

    Une fragilité structurelle du métier de scénographe

    • Acquisition récente (2017, 2020) du statut d'artiste-auteur·e
    • Non reconnaissance de ce statut par certain·e·s producteur·rice·s (UDS, 2024)
    • Droits d'auteur·e passés au forfait et non en pourcentage des recettes de l'exploitation (UDS, 2024)
    • Grandes disparités de rémunération (UDS, 2024)
    • Absence d'organisme de gestion collective (OGC) dédié
    • Indépendance qui peut confiner à l'isolement sur le sujet ou déséquilibrer le rapport de forces

    Une diversité de postures chez les producteur·rice·s

    • Transparence variable dans la discussion des enjeux
    • Sentiment de diabolisation ou de toute-puissance
    • Manque de reconnaissance de leur rôle dans l'articulation des enjeux de production, stockage et réemploi

    Une diversité de pratiques de création donc d'attribution des droits d'auteur (4 scénarios)

    • le·la scénographe n'est pas auteur·e d'une œuvre si :

    le·la metteur·euse en en scène est à l'origine de la scénographie et dans l'idée et dans la forme.

    • le·la scénographe est auteur·e d'une œuvre scénographique si :

    le·la scénographe reçoit une commande du metteur·euse en scène et crée seul·e et de toute pièce à la fois l'idée et la mise en forme de la scénographie, avec une marge de liberté susceptible de lui permettre d'exprimer ses propres choix artistiques...

    • le·la scénographe est auteur·e d'une œuvre collective ou d'une œuvre de collaboration si :

    le·la scénographe crée collégialement avec le·la metteur·euse en scène et éventuellement le reste de l'équipe à la fois l'idée et la mise en forme a minima de la scénographie... 

    • le·la scénographe est auteur·e de la scénographie en tant qu'œuvre composite si :

    le·la scénographe crée à partir d'une autre scénographie avec une marge de liberté susceptible de lui permettre d'exprimer ses propres choix artistiques.

    Dans le cadre juridique existant, les enjeux de réemploi n'introduisent pas de spécificités en matière du respect du droit d’auteur·e. Or, plus le réemploi se développe, plus il est susceptible de concerner des éléments soumis au droit d’auteur·e. En conséquence, dans une perspective d’intensification du réemploi, de nouvelles pratiques doivent être mises en œuvre pour augmenter et préserver le respect du droit d’auteur.

    Préconisations suivant les étapes du cycle de vie

    • le·la scénographe et la production déterminent conjointement le statut de l'œuvre scénographique au regard du mode de production ;
    • les modalités de communication entre les parties sont définies pour la période d'exploitation, de reprise et de réemploi, avec des préconisations relatives à l'intervention de tiers (dont ressourceries), qu'ils soient ou non déjà identifiés ;
    • un contrat de travail et un contrat de cession de droits (ou tout autre document selon le contexte) font mention des termes convenus ainsi que de la fin de vie de l'œuvre. Le contrat de cession mentionne en particulier les conditions de rémunération en cas de réemploi.

    • en achetant un bien scénographique en réemploi, je demande et/ou vérifie systématiquement les droits associés potentiels ;
    • en l'absence d'informations, je ferai usage de bon sens après avoir engagé une réflexion concertée avec des professionnel·le·s :
      • si le bien scénographique est original, le réemploi est déconseillé ;
      • si le bien scénographique n'est pas original, le réemploi est conseillé.

    • je mesure le degré d'intervention sur un bien réemployé au regard du besoin qu'il y aurait à le retourner à son état initial ;
    • en cas d'intervention minime sur le bien scénographique, j'anticipe en m'assurant que l'auteur·e initial·e accepte que son bien soit reconnu en soi et dans le cadre spécifique de la nouvelle production ;
    • je conserve l'ensemble des documents permettant le potentiel besoin de refabrication de la scénographie (dossier de circularité).

    • je fais en sorte qu'un dossier de circularité suive les différentes composantes de la scénographie dans l'ensemble de ses transports éventuels ;
    • je fais en sorte que ce dossier de circularité puisse être associé à tout élément d'emballage de la scénographie.

    • je fais correspondre les modalités de diffusion des biens scénographiques soumis à droit d'auteur aux volontés de l'auteur·e (lieu, durée, etc.) ;
    • je mentionne ou non l'auteur·e original·e de l'œuvre, son titre et sa production, selon les volontés de l'auteur·e et de la production ;

    • je m'assure que chaque bien scénographique démonté, notamment ceux soumis à droit d'auteur, soit stocké avec un exemplaire du dossier de circularité.

    • je vérifie avec l'autre partie prenante que les intentions déterminées dans le contrat de cession de droits demeurent valables, notamment s'agissant des intentions relatives au droit moral ;
    • je m'assure de la transmission du Carnet circulaire à tou·te·s les actrices et acteurs chargées de la fin de vie ou des vies futures de mon œuvre ;
    • je m'assure de mettre à jour mes coordonnées auprès des actrices et acteurs chargées de la fin de vie ou des vies futures de mon œuvre ;
    • je m'assure de conserver les coordonnées à jour des scénographes avec qui j'ai travaillé par le passé.

    Conclusion

    Sujet social autant qu'environnemental, le réemploi des scénographies d'auteur·e impose quatre points de vigilance qui sont autant de chantiers à investir :

    • celui d'une meilleure et plus précise contractualisation, avec l'intégration de droits de suite ou de droits d'auteur sur le spectacle via l'œuvre de collaboration 
    • celui d'une meilleure rémunération de l'écoconception, valorisant financièrement la qualité écoscénographique d'un travail (temps en amont, capacités de réemploi) 
    • celui d'une amélioration de la chaîne de communication, notamment entre l'artiste-auteur·e et le producteur/la productrice propriétaire de la scénographie
    • celui d'une conservation des documents administratifs et de conception

    Car la scénographie, dans sa réalité matérielle, est une œuvre éphémère avec une dimension d'usage. Pourrait-on considérer qu'il n'y a pas d'atteinte à l'œuvre si la scénographie est démantelée mais que l'on conserve les documents permettant qu'elle soit reconstruite à l'identique ? Dans tous les cas, plutôt qu'une exonération du respect des droits d'auteur·e ou du droit à une juste rémunération des qualités d'un travail, le réemploi de scénographies doit être un levier pour des pratiques respectueuses tant des professionnel·les que des limites planétaires.

    Fin 2024, la livraison du rapport de la commission du CSPLA consacré au droit d'auteur·e et à la transition écologique devrait apporter des perspectives précieuses pour les divers champs du secteur culturel.

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    Mentions obligatoires pour citer tout ou partie de ce guide : Augures Lab Scénogrrrraphie, "Droits d'auteur·e & réemploi", juin 2024, url : https://www.ecotheque.fr/boite-a-outils/travaux-du-lab/droits-d-auteur-e-reemploi