Margot Plesse
Campement artistique pour littoral #2
Le mot du comité écothèque
Le Campement artistique pour littoral # 2 imaginé par C.A.M.P (Amélie-Anne Chapelain) est inspirant pour son approche écoresponsable de l'occupation temporaire d'un site historique et naturel protégé : étude des potentiels scénographiques de l'existant, limitation de l'emprise au sol et des zones piétinées, réemploi d'éléments scénographiques, conception responsable d'un mobilier modulaire intégrant le stock de la structure productrice... Le tout dans un contexte de sobriété énergétique imposée par le site.
Publié par Quentin Rioual le 28/03/2024, mis à jour le 01/04/2024
Domaine artistique
Arts vivantsRégions
BretagneDescription du projet
Habiter un lieu non dédié aux pratiques artistiques mais chargé d'histoire, cohabiter avec le monde vivant et ne pas imposer d'impératif de production pour maintenir sa disponibilité à l'inattendu, accueillir (des scolaires, résident·e·s d'EHPAD, familles) tout au long de la journée... Pendant une semaine de juin 2023, au rythme des levers du soleil, des marées et des marches des visiteuses et visiteurs, trente personnes ont habité le fort de Porh Puns à la pointe de la presqu'île de Gâvres (Morbihan, Bretagne) : trois collectifs de danse et un collectif de designers ont travaillé en cet endroit, aux côtés d'autres artistes venu·es du street art, de la vidéo et du théâtre, avec la complicité du gardien du Fort, d'une historienne du p/matrimoine et d'une équipe de médiation. Le fort lui-même, un mobilier conçu pour l'occasion et des éléments scénographiques d'une pièce de Catherine Diverrès composaient la scénographie de ce projet.
Un projet lauréat du programme de soutien à la création artistique du Ministère de la Culture Mondes Nouveaux | Conception & production C.A.M.P | Plus d'informations : https://campementartistique.camp.bzh
Photos
Acteur·rice du projet
Sont mis en avant les membres du Lab qui ont participé à la rédaction de cette fiche, mais l’équipe projet est plus vaste.
Éco-responsabilité du projet
© studio dazd – Augures Lab Scénogrrrraphie, d'après la roue de Brezet
Qu’est-ce qu’une démarche d’écoconception ?
L’écoconception répond à un cadre strictement défini par une norme et dont l’objectif est “d’obtenir un produit ou un service qui répond à un besoin fonctionnel et dont l’impact environnemental a été réduit de façon significative” (Pôle Écoconception). S’inscrire dans une démarche d’écoconception est une manière de tendre vers cet objectif dans un cadre autonome, plus adaptable et accessible. Tous les projets référencés ne sont pas considérés comme “écoconçus” au sens de la norme, mais comme “inspirants” au sens de l’intérêt de la démarche pour réduire ses impacts à différentes étapes du cycle de vie.
Pourquoi la roue de l’écoconception ?
La roue de Brezet est un outil stratégique couramment utilisé pour construire et analyser une démarche d’écoconception : il s’agit de donner un cadre de pensée autour des impacts en amont, pendant l’usage et en aval d’un projet. Plus précisément : le cercle intérieur définit le cycle de vie du projet ; le cercle extérieur définit les stratégies d’écoconception à chacune de ces étapes du cycle de vie. Pour un axe stratégique, plusieurs actions peuvent être mises en place. Les projets référencés vous en présentent quelques-unes, pour inspiration et partage d’expérience.
Vous trouverez ci-dessous l’évaluation de ce projet selon l’approche Brezet, regroupant les différents critères pris en compte et leur explication pour chaque axe de l’approche.
0. Concevoir ensemble
Programmation engagée
La programmation des artistes a favorisé le choix d'équipes conscientes des enjeux socioenvironnementaux de l'événement et mettant elles-mêmes en place des démarches engagées en la matière.
Conscience des impacts
Des échanges avec le syndicat mixte Dunes sauvages (Grand site de France), propriétaire du site, ont permis d'identifier les conséquences des différents modes d'occupation du site. Ont ainsi été décidées (notamment) la réduction du nombre de visiteuses et visiteurs à un temps T ainsi que la non-accessibilité de certaines zones du site.
1. Sélection des matériaux ayant le moins d’impact
Matériaux/matériel issus du réemploi ou de la réutilisation
Du bois de palette a été réemployé pour la fabrication du mobilier modulaire par l'atelier ACTE (Atelier communautaire de travaux et d'entraide). Des panneaux réfléchissants déstockés par la compagnie de Catherine Diverrès ont été réemployés. Un container-bar a été réemployé du premier Campement.
2. Réduction de la quantité de matière
Réduction du poids et/ou du volume de matière
Le dôme géodésique nu avait l’avantage d’avoir une prise au vent très faible et, de par sa large circonférence au sol, d’être d’une grande stabilité, sans pour autant le recouvrir ni l’abîmer. De plus, ni son montage ni sa manutention n'ont nécessité d’engins motorisés.
3. Optimisation des techniques de production
Modulaire
Le mobilier, conçu par Rafaël Têtedoie et le studio Solide, a été imaginé de sorte à offrir un très large éventail de combinaisons d'agencement (en hauteur, en largeur et en position).
Facilité de stockage
Le mobilier a été conçu pour être empilé afin de faciliter et réduire le stockage au sol.
Technique utilisée
4. Optimisation de la logistique
Déplacement des artistes optimisé
La majorité des artistes impliqués dans le projet a passé une semaine entière sur le site (nuits comprises) et à proximité directe (espaces de camping à 150m et logement chez l'habitant·e accessible à pied). Cela a permis une intensification de la présence, de la relation avec les habitant·es et et les visiteur·ses, et une optimisation des impacts.
5. Réduction de l’impact environnemental de la phase d’utilisation
Econome en eau
Le site n'étant pas équipé en eau, l'eau consommée ou utilisée l'a été via des gourdes ou via deux bidons de 20 litres jamais remplis à plein chaque jour. Cela a considérablement rationné la consommation.
Econome en énergie
Le site n'était pas équipé en électricité. Le raccordement électrique n'offrait qu'une faible puissance : 1 seule prise de 16 ampères pour alimenter le site du fort (site situé au plus proche à 180 mètres et au plus loin à 300 mètres de la prise-source). Afin de limiter la consommation en électricité, nous avons privilégié un maximum d’équipements sur batterie. Ainsi la sonorisation était effectuée par trois enceintes type LD systems Road Buddy, ayant une très bonne autonomie sur batterie et délivrant un volume sonore tout à fait adapté à ce projet. Des projecteurs Led n’excédant pas 100w montés sur platines et posés au sol en rasant des murs illuminaient les salles intérieures du fort. Le reste de la puissance était affectée à l’espace Ressources et Bureau afin d’alimenter les ordinateurs portables, téléphones, petites enceinte bluetooth tout en respectant, cette fois encore, un roulement entre les appareils. Les gros équipements sur batterie comme les enceintes étaient mis à charger la nuit. Aucune tension n'est survenue. La sobriété énergétique de l’événement a bénéficié d’une période estivale clémente : pas de chauffage nécessaire, fraîcheur dans les salles intérieures du fort, long ensoleillement permettant aux propositions artistiques d’être éclairées en lumière naturelle.
Tri dans les espaces publics
Dans les espaces publics comme dans l'espace artistes, le tri du verre et des emballages était réalisé à proximité directe des espaces de consommation. Dans l'espaces artistes, le composteur de la Maison Glaz était disponible.
6. Optimisation de la durée de vie du projet
Réemploi ou réutilisation anticipés
Achetés en neuf (dôme), d'occasion (scénographie issue du stock de Catherine Diverrès) ou conçus pour l'occasion (mobilier), tous les éléments étaient choisis pour intégrer le stock de CA.M.P et être déployés sur d'autres événements.
Réutilisation ou réemploi internes sur plusieurs projets
Bilan
Bilan d'évaluation du projet
Sur la base des principes du Manifeste pour la permanence architecturale d'Edith Hallauer (2015), le Campement artistique pour littoral a répondu aux conditions posées par le site lui-même. Le projet a combiné : réemploi d'éléments scénographiques du premier Campement ou de stocks privés, sobriété énergétique, habitation légère en tentes ou chez l'habitant·e à proximité du site, fabrication d'éléments de mobiliers en vue d'être réemployés.