2. Choix des matériaux
Aucun matériau de conditionnement n’est écologique par nature. Cette protection supplémentaire autour de l’objet est un ajout de matière. L’écoconditionnement repose donc sur un usage raisonnable et raisonné des matériaux de conditionnement. Comment définir son besoin ? Quels critères de sélection des matériaux favoriser ? Quel en sera l'impact environnemental ? Sur quels outils d'aide à la décision s'appuyer ?
Définition du besoin
Type d'opération
Mise en réserve ; transport ; manutention ; exposition
Durée de l'opération
Temporaire ; semi-temporaire ; pérenne
Caractéristiques de l'œuvre
Matière ; fragilité ; poids ; taille ; volume ; propriétés chimiques
Analyse des risques
Milieu ouvert ou fermé ; choc ; vibration ; poussière ; lumière ; humidité...
Plus en détails
Une démarche d'écoconditionnement se caractérise avant tout par une capacité à interroger ses propres pratiques, process et habitudes, à échelle individuelle comme institutionnelle, pour chaque projet, dans chaque contexte. La première question fondamentale est la suivante : pourquoi a-t-on besoin de conditionner / à quels besoins répond le conditionnement envisagé ? Il s'agit donc d'adapter la solution par rapport à la situation, permettant ainsi d'éviter le sur-emballage / sur-conditionnement, parfois appliqué par simple mesure de précaution.
Quels éléments peuvent permettre de faire un choix raisonné ? Il s'agit d'abord de définir le type d'opération (quel usage sera fait du conditionnement et dans quel contexte) et la durée de l'opération (un prêt extérieur local ne requiert pas le même type de conditionnement qu'un stockage de collection). Ensuite il faut déterminer les caractéristiques intrinsèques (inertie, stabilité...) et extrinsèques (perméabilité...) de l'œuvre à protéger. Une sculpture en bronze ne demandera pas le même niveau de conditionnement qu'une œuvre en céramique, ce qui implique sa compatibilité physico-chimique avec le matériau de conditionnement qui sera choisi. Et enfin vient l'analyse des risques : vibrations du camion de transport, risque de dégâts des eaux dans l'espace de stockage...). À noter qu'en matière d'évaluation des risques, le conditionnement peut aussi devenir un levier d'action dans la gestion du climat intérieur, avec un impact direct sur la réduction de la consommation d'énergie : par exemple des archives conservées dans des boîtes en carton sont moins sujettes aux variations d'humidité et le climat de la pièce peut donc s'avérer moins strict.
→ Pour aller plus loin : Comportement de boîtes de conservation aux variations de température et hygrométrie ambiantes - N°30 Lettre Actualités de la conservation (bnf.fr)
Cet état des lieux aidera à déterminer le nombre et le ou les types de conditionnements nécessaires, en fonction du contexte : couche extérieure, isolation, calage, interface, etc. Il aidera aussi à déterminer les caractéristiques attendues du matériau de conditionnement. Pour cela, plusieurs critères spécifiques sont à prendre en compte.
Définition des critères matériaux
Critères conservatoires
Stabilité ; neutralité ; étanchéité ; innocuité...
Critères pratiques
Disponibilité des stocks ; prix ; volume ; facilité de manipulation...
Critères environnementaux
Monomatière ; biosourcée ; certification environnementale...
Plus en détail
Critères conservatoires
Le rôle des matériaux de conservation est de protéger les œuvres des facteurs de risques, tout en s'assurant qu'ils ne représentent pas eux-mêmes une source d'altérations de par leur composition physico-chimique ou leurs propriétés mécaniques. Une approche raisonnée du matériau de conditionnement prend en compte plusieurs besoins adaptés à l'usage envisagé. Les critères primordiaux ici retenus sont fonction du contexte : il s'agit de la durée d'utilisation et de la compatibilité du matériau de conditionnement avec le matériau constitutif de l'œuvre.
La durée de contact entre le matériau conservant et le matériau conservé dépend de l'objectif du conditionnement, prévu dans le cadre d'un transport de quelques heures ou à l'inverse à des fins de stockage permanent en réserves. Cette durée définit aussi les différents facteurs de risques possibles liés au contact du matériau de conservation.
La compatibilité des matériaux est un paramètre essentiel (fonction de la distance / des points de contact entre le conditionnement et l'œuvre). Cette compatibilité varie selon la composition des matériaux constitutifs des œuvres, qui n'ont pas tous la même sensibilité face à l'ensemble des facteurs de risques. Ici, s'assurer de la compatibilité des matériaux implique de connaître leur comportement sur le temps long (plusieurs années). Ce critère rejoint la notion d'innocuité, pour que les produits pouvant émaner du matériau de conditionnement ne dégradent pas l'objet conservé.
Ainsi, et selon les critères attendus en fonction du contexte d'utilisation et des risques à prévenir, un matériau de conservation pourra répondre aux attentes suivantes :
-
stabilité, qui définit la capacité du matériau à conserver ses propriétés mécaniques et physico-chimiques sur plusieurs années ;
-
neutralité,
qui désigne un matériau dont le pH doit être compris entre 7 et 9 afin
de ne pas endommager les collections sensibles à l'acidité ;
- selon les facteurs de risques, il pourra s'avérer nécessaire d'interroger les capacités thermiques, hygroscopiques ou occultantes, ainsi que l'étanchéité, la densité ou l'inflammabilité du produit envisagé pour le conditionnement. On s'assurera également d'une surface non abrasive, non électrostatique, sans risque de migration de colorants ou de plastifiants.
Source : Vade-mecum de la conservation préventive, Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France, 2013 ; voir également les différentes normes référencées en bibliographie, notamment la norme NF EN 15946 : Octobre 2011 : Conservation des biens culturels - Principes d'emballage pour le transport
Critères pratiques
Il est dans l'intérêt de l'utilisateur·rice d'interroger une série de critères pratiques avant l'acquisition du matériau, particulièrement s'il est question d'une alternative plus durable. Outre l'aspect économique, il est nécessaire d'anticiper la gestion et la mise en pratique du produit envisagé, jusqu'à sa fin de vie.
Avant l'acquisition, on se renseignera sur la façon dont on peut se procurer le matériau : si celui-ci est accessible sur le marché, la disponibilité des stocks et ses délais de livraison, ou encore la diversité des dimensions ou volumes proposée par le fournisseur. Il est ici possible de s'interroger sur le(s) budget(s) à mobiliser, ainsi qu'à l'adaptation de procédures pouvant faciliter des initiatives plus durables dans les appels d'offres par exemple.
Il convient également de penser les conditions d'utilisation en amont : si l'on dispose d'espaces de stockage adaptés aux quantités nécessaires - en termes de superficie, de climat et de propreté - ou encore si l'usage du matériau demande un outillage ou des compétences spécifiques.
Anticiper la gestion durable d'un matériau de conservation implique également de s'assurer des conditions d'allongement de sa durée de vie : le matériau peut-il être réemployé et réparé ?
Critères environnementaux
Dans une perspective de durabilité, nous avons évoqué plus haut la question de la définition du besoin. La réponse peut parfois amener à s'abstenir et renoncer à l'usage superficiel d'un matériau de conditionnement : le meilleur déchet est celui qui est évité ! Il est essentiel de prendre en compte que toute production, quelle qu'elle soit, a des impacts socio-environnementaux. Quand le besoin de matériau de conservation est avéré, sa quantité réfléchie et l'exigence de qualité adaptée (pour éviter un conditionnement surdimensionné par rapport aux besoins), il est important de se pencher sur ces impacts pour faire un choix conscient et éclairé. Les impacts devant être considérés sur l'ensemble du cycle de vie du matériau, les critères sont donc multiples.
→ Extraction
Où et comment est extraite la matière première ? Il est ici recommandé de choisir une matière issue d'une ressource renouvelable (dont le stock peut se reconstituer sur une période courte), biosourcée (matière organique végétale, de préférence d'agriculture biologique), mono-matière ou à défaut composite facilement séparable (pour faciliter sa recyclabilité), recyclée (à noter que le procédé est tout de même énergivore), locale et/ou extraite dans des conditions raisonnées (remise en état des sites, préservation de la biodiversité, respect des droits humains).
→ Fabrication
Quelles quantités d'énergie et de ressources sont nécessaires pour transformer la matière première ? Il faudrait ainsi privilégier le choix d'un matériau dont la production et la fabrication sont à basse consommation énergétique, à faibles émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) et/ou à faibles émissions de Composés Organiques Volatiles (COV). Il est aussi intéressant de s'interroger à propos de l'impact de cette production sur l'écosystème local, en termes d'externalités positives ou négatives, pour la population et la biodiversité. Enfin, la mise en place de conditions de travail dignes sont également à prendre en compte.
→ Transport
Le temps et la méthode d'acheminement du produit sont aussi à considérer. Quel est le moyen de transport utilisé et son impact carbone ? Quelle est la quantité et la composition de l'emballage ? Quelle est la distance parcourue entre le lieu de production, le lieu d'utilisation et le lieu de traitement du matériau devenu déchet ?
→ Usage
Durant toute sa durée d'utilisation, le matériau de conditionnement peut toujours avoir des impacts environnementaux. Il est ainsi préférable de choisir un matériau à faibles émissions de Composés organiques volatiles, avec une innocuité totale pour les êtres vivants et à la durée d'usage acceptable (plusieurs années). Pour allonger la durée de vie du matériau, il est préférable que celui-ci soit réparable, réemployable (pour un usage identique) et réutilisable (pour un usage identique ou différent via une remise en état après avoir été considéré comme déchet).
→ Fin de vie
Afin d'optimiser la fin de vie du matériau, plusieurs points sont à anticiper :
- l'absence de perturbateurs de recyclage : clous, vis, colles, peinture... ;
- l'existence d'infrastructures opérantes : bennes de tri pour la filière classique de recyclage, filière spécialisée ou retour fabriquant pour du recyclage en boucle fermée, compostage industriel ou individuel... ;
- les conditions d'accès à ces infrastructures.
→ Certification environnementale
- Ecolabel européen : label conforme à la norme internationale ISO 14024, garantissant qu'est évalué l'ensemble du cycle de vie du produit (ACV), que les critères portent sur les impacts les plus significatifs, que la certification est fournie par un tiers indépendant... Degré d'exigences et de fiabilité très élevé ;
- Autres labels environnementaux : AB, NF Environnement, FSC, PEFC... - voir les labels recommandés par l'Ademe pour éviter les labels greenwashing (privés, auto-déclarés) ;
- FDES (fiche de déclaration environnementale et sanitaire) : document normalisé qui présente l'analyse du cycle de vie du matériau pour rendre compte de la performance environnementale du matériau, très utilisé dans le secteur du bâtiment ;
- Présence du matériau dans une base environnementale : base INIES ou base Empreinte par exemple.
À noter que les données de l'ensemble de ces critères peuvent être difficiles à trouver et à obtenir. Il est recommandé de demander aux fournisseurs un bilan carbone ou une ACV (analyse de cycle de vie) pour avoir une vue globale des impacts du matériau, délivrés par des entreprises spécialisées dans ce type de calcul (Karbone Prod par exemple). Ils ne l'ont pas encore fait ? La transition écologique nécessite une collaboration inter-métier et pluri-institutionnelle : plus les structures culturelles seront nombreuses à sensibiliser leurs prestataires à ces sujets, plus les entreprises seront incitées à aller dans ce sens.
Sources : travail du comité écothèque de l'Augures Lab Scénogrrrraphie ; Les labels environnementaux - Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires ; Ademe
Panorama de logos

Outils d'aide à la décision
Gallery Climate Coalition
La Gallery Climate Coalition est un réseau international d'artistes, institutions, foires, maisons de vente et galeries d'art dont l'objectif est de rendre le secteur de l'art contemporain plus soutenable et moins impactant pour l'environnement. Par une pratique collaborative, le réseau développe des actions et apporte conseil et expertise dans le domaine de la décarbonation, du transport, de l'emballage, du voyage et de l'énergie. Il met également à disposition un calculateur carbone. Parmi les ressources disponibles, le document "Alternative Packing Materials and Their Correct Uses" produit par Kim Kraczon et le document "Advised Tape & Wrapping Material Combinations" produit par Sarah Titheridge sont particulièrement intéressants ; à noter en revanche que toutes deux estiment que ces documents ne sont plus suffisamment à jour !
Sustainability Tools in Cultural Heritage (STiCH)
Sustainability Tools in Cultural Heritage (STiCH) est un calculateur carbone lancé en 2021 et basé sur l'analyse du cycle de vie (ACV) et une bibliothèque d'études de cas et de fiches d'information conçues pour aider les professionnel·les à faire des choix éclairés et durables pour réduire leur impact sur l'environnement. Les items inclus dans le calculateur correspondent à des matériaux de conservation pour le stockage mais aussi à des matériaux d'emballage pour le transport et la caisserie. Les données carbone disponibles sont liées à la production des matériaux. L'outil est en cours d'amélioration pour notamment étendre la liste des matériaux disponibles sur le calculateur et inclure un paramétrage lié à la distance parcourue.
Preserv’Art
Preserv'Art est un centre de ressource en ligne créé par le Centre de Conservation du Québec. Il comprend des fiches détaillées de plusieurs matériaux (carton, textile, bois, papier, etc.) pour aider à faire le bon choix.
Gogreen
Le projet Gogreen a débuté en 2022 et a pour objectif de définir ce qu'est la conservation durable, de contribuer à modifier les normes en vigueur, à développer des pratiques de conservation utilisant la « pensée verte », à développer et à introduire des matériaux innovants et écologiques (chimie verte), de créer une plateforme numérique permettant une évaluation de l'impact environnemental des pratiques de restauration et de soutenir la recherche et le développement d'alternatives plus écologiques. La plateforme, en cours de création, devrait "regrouper des informations essentielles sur les matériaux et les techniques qui sont actuellement peu nombreuses, fragmentées, partiellement ou difficilement accessibles au public (c'est-à-dire stockées dans des revues à abonnement, des dépôts, des bases de données), facilitant ainsi leur disponibilité pour les restaurateurs et encourageant leur transformation vers une profession plus verte."
Construction Material Pyramid, Cinark
Cet outil créé par l'Académie royale des beaux-arts du Danemark offre une vue générale de l'impact CO₂ des matériaux de construction. Il analyse le matériau par le prisme de sa fonctionnalité / de son usage et met à disposition un calculateur. Son utilisation depuis la France biaise les données pour l'impact lié à la provenance, et donc la dimension locale ou non. Cependant, sa visualisation en forme de pyramide exprime de façon imagée l'impact des matériaux par un classement des moins aux plus impactants et offre ainsi une très bonne entrée en matière.
Sustainable Cultural Production : Museum
"Sustainable Cultural Production : Museum" est un guide en anglais autour de la production d'exposition, avec un focus synthétique autour de l'enjeu du choix des matériaux.
The Materials Hierarchy, Theater Green Book
Il s'agit d'un outil d'aide à la décision en anglais, appliqué au secteur du spectacle vivant qui peut se transposer au sujet de l'écoconditionnement pour les institutions muséales.
Projet Odalisque
Référencé dans le registre des projets d'écoconditionnement annexé à ce guide, il s'agit d'un projet en cours porté par Stéphane Pompidou au sein de l'Institut de Mécanique et d'Ingénierie de l'Université de Bordeaux. Il vise à développer un outil d'ACV (analyse cycle de vie) pour les expositions, qui permettrait d'évaluer entre autres l'impact du conditionnement des œuvres. Un projet à suivre...
Tableau d'évaluation écoresponsable des matériaux de conservation
Ce tableau a été réalisé en 2021 par Anaïs Perrichon dans le cadre de son mémoire de master à l'École du Louvre, "Vers une évaluation écoresponsable des matériaux de conservation", sous la direction de Florence Bertin et Hélène Vassal. Il propose un référentiel de notation de plusieurs critères relatifs aux matériaux : conservatoires, pratiques et environnementaux. Ce tableau permet de questionner le matériau selon le fournisseur, le domaine et l'usage. Il fonctionne par attribution de points pondérés, avec le calcul d'une note globale par type de critère.
Disponible en téléchargement ci-dessous
Atelier choix des matériaux
Lors de la journée professionnelle "Écoconditionnement des œuvres" organisée le 23 mai 2024 au Musée du Quai Branly - Jacques Chirac, il nous a semblé essentiel d'organiser un atelier collaboratif autour du choix des matériaux à partir d'études de cas concrets et une méthodologie à suivre. Cet atelier a été co-conçu et animé par Florence Bertin, formatrice en conservation préventive et responsable du département des collections au Musée des Arts décoratifs. Nous partageons ici le support d'atelier, qui peut être approprié, décliné et répliqué dans d'autres contextes.
Disponible en téléchargement ci-dessous
En téléchargement
Tableau d’évaluation écoresponsable des matériaux de conservation, par Anaïs Perrichon
Atelier choix des matériaux, par Florence Bertin & l'Augures Lab Scénogrrrraphie
Analyse des matériaux couramment utilisés
En introduction du sujet, nous posions le constat que depuis les années 1990, les matériaux utilisés au quotidien pour l'emballage et le conditionnement sont souvent des plastiques issus des hydrocarbures fossiles, leurs propriétés physico-chimiques répondant à des exigences élevées, fixées par les normes de conservation. La systématisation de l'utilisation des différents plastiques ces dernières décennies a permis aux équipes muséales de gagner du temps, en écartant les questionnements sur le choix des matériaux en fonction des besoins réels. Il est aujourd'hui nécessaire d'intégrer une nouvelle donnée, celle de l'impact environnemental, de l'approvisionnement jusqu'à la fin de vie du conditionnement.
À ces polymères dérivés du pétrole s'ajoute un autre matériau très couramment utilisé et de manière systématique : la caisse en bois. Une enquête de Lou Hénot de l'École du Louvre montre que le bois contreplaqué est le matériau le plus utilisé dans le transport d'œuvres (77% des caisses référencées). Dans le cadre des journées d'études de l'AFROA en 2019, Stéphane Pompidou et Nicolas Berger ont réalisé une analyse de cycle de vie simplifiée sur des caisses de transport pour une exposition itinérante, copilotée par le Musée d'Orsay. L'étude a porté sur l'ensemble des matériaux de conditionnement utilisés (kraft, Valsem, mousse, polystyrène, bois...) et 8 impacts environnementaux ont été analysés : réchauffement climatique, diminution de la couche d'ozone, formation de particules fines, toxicité humaine, occupation des sols, pénurie de ressources minérales, pénurie de ressources fossiles, consommation en eau. Les résultats font ressortir que :
- le bois contreplaqué (assemblage de feuilles de bois collées) est très nettement le matériau le plus impactant sur l'ensemble des effets environnementaux étudiés ;
- le bois de manière générale (bois contreplaqué et bois massif) a le plus fort impact sur les ressources naturelles (occupation des sols et pénurie de ressources minérales) ;
- la mousse et le polystyrène, dérivés du pétrole, ont un impact plus marqué sur les ressources fossiles, le réchauffement climatique et la consommation d'eau ;
- comparativement aux autres matériaux, les impacts du papier kraft et du Valsem sont négligeables.
Pour aider à réinterroger nos pratiques et nos besoins, le groupe de recherche-action de l'Augures Lab Scénogrrrraphie a conçu un tableau d'analyse des matériaux couramment utilisés pour essayer d'identifier des alternatives selon différents scénarios d'usage (durée, type de conditionnement, fonction...). Ces alternatives n'ont pas encore toutes été éprouvées par la recherche, l'expérimentation et des calculs d'impact précis, mais il s'agit avant tout de proposer un outil de réinterrogation des besoins, puis de proposer des solutions à tester, en cohérence avec les problématiques de conservation qu'elles suscitent. L'évaluation environnementale des matériaux a été réalisée à partir du tableau d'Anaïs Perrichon (voir ci-dessus).
Sources : Jean Tétreault, Scott Williams, Guidelines for selecting materials for exhibit, storage and transportation, Canadian Conservation Institute, 1993 ; Nathalie Palmade-Le Dantec, "Changer matériaux et pratiques pour le conditionnement des oeuvres", revue Patrimoines n°18, 2023, pp. 60-61 ; *Compte-rendu de la journée d'études de l'AFROA "Régie des œuvres et développement durable", 2019 ; Lou Hénot, "Transport et conditionnement d'oeuvres d'art: l'alternative des caisses réutilisables pour les musées français", mémoire d'étude, sous la direction de Florence Bertin, Ecole du Louvre, 2023
En téléchargement
Tableau d'analyse des matériaux couramment utilisés, par l'Augures Lab Scénogrrrraphie
Expérimentations et prospective
La volonté de partager un registre recensant les initiatives portées par les institutions culturelles part d'un constat : l'écoconditionnement des œuvres d'art est un sujet de recherche encore récent, au stade des expérimentations. Si les tests scientifiques sont en cours et ne permettent pas à l'heure actuelle de s'accorder sur une typologie stricte d'éco-matériaux, il a paru pertinent de se tourner vers les expérimentations et bonnes pratiques initiées par les institutions elles-mêmes. Ce registre a vocation à regrouper les initiatives à l'étude ainsi que les constats empiriques sur les néo-matériaux au fil des retours d'expérience, afin de partager des actions inspirantes et d'initier de nouvelles collaborations fondées sur des intérêts communs, nécessaires au développement de la connaissance en matière d'écoconditionnement.
Ce registre est collaboratif : chacun·e peut contribuer à son contenu en remplissant ce formulaire ou en écrivant à bienvenue@augureslab.org.
Matériaux à potentiel
Écomousses (calage)
Le projet doctoral "Moussaillon", porté par le Centre de recherche sur la conservation, vise la mise au point d'une mousse de polymère composite avec des constituants biosourcés et/ou bioassimilables à base de cellulose.
Le Greenart project, projet européen piloté par le Consiglio Nazionale Delle Ricerche, mène lui aussi une étude scientifique pour développer une mousse biosourcée et recyclable alternative au polyuréthane. Des tests sont en cours notamment autour du cardanol, issu de l'enveloppe de la noix de cajou.
Des chercheurs du Centre des matériaux des mines d'Alès ont par ailleurs créé une nouvelle mousse biosourcée et biodégradable : AlgiFoam. Identifié comme alternative au polystyrène, ce matériau polymère innovant est à base d'alginate et se présente sous forme de billes expansées. Le projet est à l'étude pour un passage à l'échelle industrielle.
Coussins biosourcés (calage)
Avec le projet "MatCal", le musée du Quai Branly - Jacques Chirac, en collaboration avec le laboratoire du département de la formation des restaurateurs de l'Institut national du patrimoine, étudie grâce à un financement de la Fondation des Sciences du Patrimoine le potentiel de huit matières végétales qui pourraient éventuellement remplacer les mousses, ouates et billes synthétiques. Des tests physico-chimiques et mécaniques ont ainsi été réalisées sur : l'élancrin, l'élancrin latex, l'élancrin carbone, le crin végétal, le kapok, la fibre textile recyclée, les balles de millet et les cosses de sarrasin. Les premiers résultats d'analyses (pH, Oddy Test, dégorgement, test de vieillissement, relaxation, fatigue et vibrations), obtenus à l'été 2024, étant prometteurs pour certains de ces matériaux, une seconde phase de projet devrait voir le jour pour effectuer des analyses de cycle de vie et alimenter une base de données accessibles à tous·tes.
Dans le même esprit, suite à une collaboration entre le musée des Arts décoratifs et Stéphane Pompidou (Université de Bordeaux), il a été identifié que le polystyrène utilisé dans les emballages pouvait être remplacé par de la paille traitée et emballée, et générait ainsi un bénéfice environnemental important.
Tissus naturels (housses de protection)
Caisses en chanvre (couche extérieure)
Carton (couche extérieure, supports de manipulation)
Le musée du Quai Branly - Jacques Chirac mène plusieurs expérimentations pour remplacer le bois contreplaqué par du carton sur différents conditionnements, notamment la caisserie. Les projets et techniques développées sont plus détaillées au chapitre suivant (3. Optimisation du conditionnement).
En téléchargement
Registre des projets d'écoconditionnement, par l'Augures Lab Scénogrrrraphie
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Introduction
1. Le sujet
2. Choix des matériaux
Voir ci-dessus
3. Optimisation du conditionnement
4. Optimisation de l'usage et de la fin de vie
5. Pilotage de la transition
6. Recommandations
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Mentions obligatoires pour citer tout ou partie de ce guide : Augures Lab Scénogrrrraphie, "Guide de l'écoconditionnement des œuvres", juin 2024, url : https://www.ecotheque.fr/boite-a-outils/travaux-du-lab/eco-conditionnement-des-oeuvres